09/07/2013 - 11h21

[JE] QUAND KANA EXPLIQUE LE SHOJO A KANA !

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Nouveauté

Nous étions présents à la Masterclass shojo manga proposée par Shogakukan lors de la Japan Expo.

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Les tomes 1 de Natsumeki!! et Kiken mania

Nous vous proposons de découvrir les étapes de fabrication d’un shojo manga grâce à Kana Nanajima, l’auteure de Natsumeki!! et Kiken mania qui s’est déplacée spécialement pour rencontrer des lecteurs francophones et faire découvrir son art.

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Kana Nanajima pose pour Kana !

Kikenmania est une série shojo en cours de parution dans le magazine Sho-comi de la Shogakukan. Le rythme du Sho-Comi est bimensuel. Kana Nanajima doit donc livrer pour chaque numéro pas moins de 31 pages sans compter les bonus !

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Le magazine Sho-comi de la Shogakukan

Passons en revue quelques techniques et règles qui régissent le shojo manga.

Ces règles concernent la construction du manga, de quelles façons tous les éléments dessinés ou textuels vont être agencés. Elles donneront à la série toute sa lisibilité !

Prenons d’abord la construction d’une double-page : comme le sens de lecture est de droite à gauche, s’il doit y avoir un personnage particulier placé seul en pleine page, ce dernier sera plutôt situé sur la page de gauche. Donc si le beau mec est sur la page de gauche, ce n’est pas anodin ! Dites-vous bien qu’il va avoir une importance particulière dans l’histoire !

Une autre technique que l’auteure garde en tête est celle du feuilleter, c’est-à-dire le rapport entre les pages quand on les tourne, quand on les feuillette. La dernière case d’une page de gauche est importante : on peut y voir un gros-plan de l’héroïne, visage de profil, son regard est tourné vers l’extérieur de la page, donc vers la page qu’il va falloir tourner pour découvrir la suite. Non seulement, cela entretient le suspense, mais le lecteur est invité à se mettre à la place de l’héroïne et à partager ses interrogations, ses attentes, ses espoirs. Lorsque l’on tourne la page, c’est une pleine page avec un couple amoureux. Sont-ils ensemble? Depuis longtemps ? Partagent-ils les mêmes sentiments…?

Une autre règle du manga, shojo ou non, est de bien représenter visuellement le temps et le lieu. Il s’agit en effet de ne pas perdre le lecteur entre deux séquences, entre deux pages. C’est pourquoi sont bien représentés les lieux de l’action et la chronologie du récit. Par exemple, nous voyons un coupe sur une plage, il fait jour, on tourne la page et le couple est maintenant devant la maison de la fille et on aperçoit la lune dans le ciel. L’unité de temps et de lieu !

Une attention est également accordée à la vitesse du récit. Si le rythme est rapide sur les scènes d’humour, les scènes tragiques ou à dimension psychologique vont, elles, s’étirer un peu plus longuement.

Une dernière règle concerne la fin de l’épisode : cette dernière se doit d’être marquante. C’est très important car le lecteur doit avoir envie de découvrir la suite et donc d’acheter le prochain magazine !

Mais revenons aux étapes de la réalisation du shojo proprement dite :

L’auteure imagine une histoire et en combien de volumes, elle pourrait tenir, ensuite en combien d’épisodes – sachant qu’il faut compter 5 ou 6 épisodes par volume relié.

Si la série est prépubliée dans un magazine, le nombre de pages va être déterminant, l’histoire va être envisagée épisode par épisode – dans ce cas-ci de 31 pages.

La première étape est le « plot », l’histoire proprement dite de l’épisode, l’auteure imagine les conversations que les personnages vont avoir dans cet épisode, quels seront les dialogues principaux et elle les couche sur le papier, en quelques caractères. Kana Nanajima imagine ensuite la place que ces textes vont prendre sur la planche, le nombre de bulles, leur disposition exacte. Il faut compter 1 jour de réalisation.

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Kana Nanajima en pleine action !

Ensuite, l’auteur se lance dans les nemus, que les lecteurs de Bakuman connaissent bien ! Les 31 pages vont être ébauchées, page par page. L’auteure y décide qui intervient, combien de cases il y aura sur la planche, combien de personnages, pas tous représentés à la même taille identique pour ne pas lasser visuellement, qui sera en gros-plan, qui sera en vue de profil ou de trois-quarts, où l’action aura lieu. Bref, la construction proprement dite.

Une fois que l’auteure a fini ses nemus – ce qui aura pris quand même 5 à 6 jours –  s’entame la discussion entre l’auteure et son éditrice. Ensemble, elles vont décider ce qui doit être accentué, supprimé ou présenté différemment.

Si la mangaka imagine l’histoire et la dessine, son éditrice, elle, se glisse à la place du lecteur pour effectuer sa lecture critique des nemus.

Un seul objectif encore et toujours : faire plaisir au lecteur !

Une fois, les nemus validés, l’auteure va commencer la phase de crayonnés. Le dessin prend forme. Dans le shojo manga, c’est l’expression des sentiments l’élément central. Les yeux vont faire l’objet d’une attention toute particulière, plus ils seront « travaillés », plus l’émotion passera et plus la qualité du shojo s’en ressentira.

Il n’est pas rare que les auteurs se placent devant un miroir pour reproduire le plus fidèlement possible les expressions, les réactions des personnages. Ils utilisent également des figurines qu’ils peuvent bouger pour reproduire des attitudes, des positions. Cette phase va occuper la mangaka pendant 3 à 5 jours.

Les crayonnés seront bien relus, de manière à repérer les petites erreurs éventuelles (on peut facilement le comprendre quand un rythme de rendu de pages est si élevé). Citons par exemple un grain de beauté qui change de place sur un visage, un ruban dans les cheveux qui disparaît d’une case à l’autre.

Lorsque les crayonnés sont validés, l’encrage va donner son relief définitif aux dessins. Il restera encore à l’auteur à effectuer le dessin de couverture et les bonus illustrés tels que des cartes postales, des marques-page offerts pour des opérations commerciales pour le magazine de prépublication ainsi que les petits mots de l’auteur qui parsèmeront le volume relié.

Bref, cela demande pas mal de boulot pour qu’un petit shojo voit le jour ! Et dès les 31 pages bouclées, il s’agit déjà d’entamer les suivantes ! Mais quel bonheur pour nous, en tant que lecteurs, de découvrir ces pages tant travaillées !

Maintenant, promis, on fera encore plus attention aux décors, à la façon dont les cases sont disposées, les angles de vue et, au final, on pourra lire entre les lignes et comprendre encore plus de choses ! ;o)

Bonne(s) lecture(s) !

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